La Pietà de Michel-Ange fait partie des œuvres d'art les plus célèbres au monde, un succès qui n'a peut-être d'égal que La Cène et La Joconde : on estime que la sculpture attire entre 40 000 et 50 000 visiteurs par
jour. Après les interventions de restauration réalisées pour le Cenacolo et pour la Chapelle Scrovegni,
iGuzzini a répondu à la volonté de la Fabrique de Saint-Pierre, en la personne du Cardinal Angelo Comastri,
pour un nouvel éclairage qui permette aux très nombreux visiteurs d'apprécier pleinement l'œuvre et de
pouvoir obtenir des scénarios différents pour des circonstances et visiteurs particuliers.
L'œuvre, en marbre de Carrare, est de dimensions non négligeables, avec une hauteur de 174 cm, une largeur de 195 cm et une profondeur de 69 cm. Cette profondeur limitée laisse supposer qu'elle a été conçue pour être positionnée à l'intérieur d'une niche.
La sculpture a été réalisée en 1499 par le très jeune Michel-Ange, aux prises avec l'une de ses premières œuvres. La mère du Christ tient dans ses bras le corps de son fils mort et elle a l'apparence d'une fille bien plus jeune que Jésus, car le sculpteur s'appuie sur Dante Alighieri et sur la prière de Saint-Bernard, dans le dernier chant du Paradis : « Vierge Mère, fille de ton Fils, humble et élevée plus qu’aucune créature, terme fixe d’un éternel conseil, tu es celle qui tant a ennobli l’humaine nature, que son auteur ne dédaigna point de s’en revêtir » : la mère est donc mère, mais en même temps la fille du Dieu Créateur.
Dans la tradition chrétienne, le thème de la Vierge de Pitié était représenté avec la Vierge assise, le buste vertical, et la dépouille du Christ avec une certaine rigidité. Michel-Ange a fortement humanisé les corps des deux protagonistes et les sentiments de la Vierge : dans sa Pietà, Marie porte un habit aux nombreux plis et sa tête est recouverte d'un voile formant un beau drapé ; de sa main droite elle soutient le Christ, ses doigts lui serrent le thorax sous l'épaule droite, en le protégeant d'un pan de son habit. La main gauche est posée en bas, au niveau du genou de Jésus et est ouverte, la paume vers le haut. La tête du Christ est penchée en arrière et son bras droit retombe vers le bas.
Selon le Cardinal Comastri, Michel-Age a su fondre dans le visage de la Madone deux sentiments apparemment inconciliables : la douleur et la sérénité. Ce chef-d'œuvre absolu est aussi la seule œuvre signée de Michel-Ange : la bande qui traverse le buste de la Vierge porte l'inscription : MICHEL.A[N]GELVS BONAROTVS FLORENT[INVS] FACIEBAT (Le florentin Michelangelo Buonarroti la réalisait) en utilisant l'imparfait en référence à Pline l'Ancien qui écrivait que l'œuvre n'est jamais parfaite, mais peut toujours être perfectionnée.
Elle se trouve maintenant dans l'immense basilique Saint-Pierre, dans la nef de droite, dans la première chapelle que l'on rencontre, mais uniquement depuis la moitié du XVIII ème siècle. La sculpture est protégée par une épaisse vitre en verre de sécurité adoptée à la suite des détériorations dues à l'agression d'un déséquilibré en 1972 et après une longue restauration. Les innombrables visiteurs peuvent donc voir l'œuvre à une distance fixe et de positions bien déterminées.
Depuis le mois d'octobre 2018, La Pietà dispose d'un nouvel éclairage sur un projet de l'agence Rossi Bianchi Lighting Design, mis au point et réalisé grâce à un dialogue constant et constructif entre toutes les attentes, les compétences et les professionnels qui ont abordé cette œuvre en toute conscience de l'immense responsabilité assumée lors d'opérations sur un bien inestimable.
Le bureau de conception avait comme objectif de créer une vision d'ensemble unitaire et cohérente, où le regard puisse s'attarder et percevoir l'intensité expressive de chaque détail. Ceci exige un éclairage dosé et composé, qui puisse restituer les reliefs des formes et le brillant du marbre. L'intervention, qui a nécessité le retrait de tous les appareils en place, s'articule sur quatre scénarios lumineux différents.
Chaque scénario a été défini en fonction d'exigences et de critères généraux qui ont déterminé le choix et la disposition des nouveaux corps éclairants : des sources LED de dernière génération ont été utilisées, avec des tons de blanc chaud (température de couleur 3000K), un rendu de couleur très élevé, une longue durée et de faibles consommations d'énergie ; des corps éclairants compacts, de petites dimensions, totalement dissimulés ou à faible impact visuel, des projecteurs à haut rendement, à émission focalisée et faisceaux d'ouverture extrêmement contrôlés pour l'éclairage de la sculpture mais aussi de la chapelle, l'adoption de rails électriques installés en position verticale, sur les côtés des piliers donnant sur l'œuvre, pour permettre la pose des projecteurs à des hauteurs adaptées à la direction des faisceaux et au contrôle des luminances, l'exclusion de travaux de maçonnerie ou de points d'alimentation supplémentaires, un confort visuel maximum et une vitre de protection, la possibilité de régler les intensités lumineuses émises par chaque appareil, une exigence indispensable pour la définition et le choix des différents scénarios.
L'intervention ne s'est pas limitée à la sculpture, mais a aussi concerné toute la chapelle qui abrite l'œuvre. Les appareils utilisés sont des projecteurs Palco optique 12° et 26° et Palco cadreur, tous installés sur des rails Low Voltage (basse tension). Des lignes de lumière Underscore ont aussi été utilisées pour l'éclairage des voûtes.
Les corps éclairants, tous à technologie DALI, sont divisés en groupes d'allumage avec possibilité de calibrer les intensités lumineuses émises, ce qui permet de décliner l'éclairage en différents scénarios, pour des exigences et intentions visuelles variables dans le temps, le tout contrôlé par un système de gestion.
Le projet définit des situations lumineuses alternatives en utilisant les quatre points cardinaux : « scénario nord - sculptural », « scénario est - coupe de lumière », « scénario sud - pleine lumière » et « scénario ouest - quotidien », sans vouloir attribuer à ces titres une autre signification que celle de la clarté d'exposition.
Le scénario nord - sculptural est axé sur les projecteurs Palco sur rail positionnés à côté des piliers. Pas de directionnalité prédominante perçue, l'équilibre des clairs et obscurs restitue parfaitement la plasticité des formes. Le regard peut s'attarder sur chaque détail tout en saisissant dans une vision générale, l'harmonie de l'ensemble. La voûte centrale, ornée des fresques de Giovanni Lanfranco, est éclairée uniformément avec des valeurs progressivement décroissantes vers les chapiteaux. Les arcades et les voûtes à berceau latérales reçoivent une lumière homogène de plus faible intensité. Le crucifix reçoit la lumière en diagonale d'un projecteur installée à une certaine distance sur une corniche.
Le scénario est - coupe de lumière est centré sur un faisceau de lumière provenant d'un projecteur installé sur le chapiteau latéral à l'est, qui éclaire en section La Pietà. La direction d'incidence est évidente, les ombres sont marquées. Le visage incliné de la Vierge reçoit un tendre éclairage de bas en haut. L'éclairage doux des voûtes et du fond encadre le groupe en marbre. Les reflets, vibrants, font ressortir la brillance du marbre dans une vision suggestive, à fort impact émotionnel.
Le scénario sud - pleine lumière est imaginé pour des évènements ou activités spécifiques nécessitant des valeurs d'éclairement plus élevées, afin de permettre une perception de La Pietà aussi depuis la nef centrale de la basilique. Par rapport aux scénarios précédents, l'éclairage de la voûte centrale, des arcades et des voûtes latérales est plus soutenu. L'éclairage rasant est renforcé grâce aux projecteurs frontaux. L'autel est caressé par une lumière diffuse. Du haut, un projecteur Palco optique 26° met en valeur le crucifix.
Le scénario ouest - quotidien est basé sur les projecteurs sur rail à optique de 12° positionnés à côté des piliers. Leurs faisceaux se croisent à des angles symétriques pour restituer la plasticité des formes. Le fond, éclairé de bas en haut, équilibre les contrastes. La voûte centrale est éclairée uniformément avec des valeurs progressivement décroissantes vers les chapiteaux. Les arcades et les voûtes à berceau latérales reçoivent une lumière homogène d'une intensité légèrement inférieure. Le crucifix est souligné par un projecteur posé à une distance qui permet de réduire les ombres portées. Les touches claires et foncées restituent une perception générale cohérente et unitaire, avec des valeurs adaptées aussi bien à une vision de près, de l'intérieur de la chapelle, qu'à distance à travers la vitre de protection. Le nouvel éclairage contribue à faire apprécier au mieux ce chef-d'œuvre absolu d'art, mais aide aussi à souligner les éléments théologiques et le caractère religieux de l'œuvre pour la comprendre pleinement.